Des plans inédits de l’ancienne église Saint-Jean-Baptiste de Breteuil, en 1748-1749
Les archives départementales de la Somme, conservent, sous la cote 3 B 449, une série de plans inédits et fort précieux de l’ancienne église Saint-Jean-Baptiste de Breteuil levés, en 1749, à l’occasion d’un contentieux formé entre le curé, Jacques Macqueron de Belval (1713-1784) et la fabrique paroissiale de Breteuil, d’une part, et l’abbé commendataire de Breteuil (depuis 1710), Louis de Lamothe-Villebret, comte d’Apremont, « demeurant à Paris », au sujet des réparations à faire aux couvertures du chœur de l’église, par suite de la chute, en 1748, d’un pan de toiture du clocher sur ledit chœur. On le sait, les travaux de construction et de réparation du chœur étaient à la charge du gros décimateur, soit l’abbaye de Breteuil, alors que les travaux correspondant à la nef incombaient à la fabrique paroissiale. Restait les inévitables problèmes que posaient bien souvent la construction et l’entretien du clocher hors œuvre, implanté sur le flanc sud du chœur.
L’abbé de Breteuil considère alors que les travaux d’entretien du clocher sont à la charge de la paroisse (et par conséquent les éventuels dommages en résultant sur le chœur), alors que le curé et les paroissiens jugent du contraire, estimant et demandant « que les befroy, clocher et chapelle de la Sainte Vierge de la paroisse de Saint-Jean…soient déclarés ne faire qu’un seul corps et cancel avec le cœur de lad. église et comme tels en la charge de l’abbé comme gros décimateur… »
L’affaire, portée en première instance devant le bailliage de Montdidier prescrit une visite d’experts entrepreneurs pour examiner les lieux contentieux. Une première expertise donne raison à la paroisse, en considérant que les « befroy, clocher et chapelle…sont unis et liez avec le cœur de lad. esglise et sont séparés de la nef ». Sur contestation de l’abbé, une nouvelle expertise est organisée en janvier 1748. La fabrique paroissiale désigne comme experts François Sénéchal, charpentier à Montdidier, et Jean Decagny, dit Gros-Jean, maçon à Montigny. Le 10 février, l’abbé nomme pour ses experts Toussaint Vuiart, maçon à Hédencourt, et Paul Carlier, charpentier à Montdidier. Ce sont ces entrepreneurs qui lèvent une première série de plans, coupes et élévations.
En juin 1748, une nouvelle visite d’experts et un nouveau levé de plans sont demandés contradictoirement par l’abbé. Cette fois, des architectes apparaissent parmi les experts désignés. Pour le curé et la paroisse, ce sont Louis Deay ou Deshayes (?), « architecque et maitre masson », et Thomas Lefebvre, maître charpentier, demeurant tous deux à Beauvais. L’abbé de Breteuil nomme pour sa part un praticien reconnu, Christophe Projet, architecte de l’abbaye de Corbie, et un certain François Dallongeville, maître charpentier à Villers-lès-Roye.
En dépit d’une deuxième visite sur place par ces experts, l’abbé de Breteuil renchérit en demandant une troisième expertise. Cette fois, le « tiers expert » désigné par l’abbé se nomme Claude Bouillet et est architecte à Compiègne. Il lève une nouvelle série de plans en février 1749.
Par ailleurs, en juillet 1748, plusieurs paroissiens de Breteuil, les nommés Jean Pecquet, Cyr Dufour, Cyr Paillard, Jean-Baptiste Dubois, Adrien Devillers, Nicolas Mouret, Adrien Bérenger et Pierre Darras, « particuliers…comme les plus intéressés à la réhédification, construction ou réparation du clocher de Saint-Jean », déposent requête en soutien du curé et de la fabrique paroissiale.
Finalement, à l’issue ces nombreuses péripéties, les magistrats du bailliage de Montdidier, par sentence du 19 juillet 1749, font droit à la demande du curé et de la fabrique paroissiale et déclarent les réparations à faire à la charge de l’abbé de Breteuil, en ajoutant que « les réparations actuellement à faire et celles qui surviendront à la suitte au clocher de l’esglise de St-Jean…et à la chappelle de la Vierge, comme estant unies et ne faisant qu’un seul corps avec le chœur et le cancel de ladite esglise » seront « en la charge du sieur abbé… »
Une fois n’est pas coutume, la fabrique paroissiale l’emportait en justice sur les prétentions du gros décimateur !