Il y aura, ce mois-ci, 113 ans, se déroula à Breteuil l’une de ses plus grandes et resplendissantes fêtes : la grandiose cavalcade du 29 mai 1910. Succédant à celle de 1894, malheureusement peu documentée par les photographies, la cavalcade de 1910 avait été organisée par la municipalité de Breteuil, alors dirigée par son député-maire, Adéodat Compère-Morel. Les industriels et commerçants de Breteuil prêtèrent un concours particulièrement actif à l’organisation et au déroulement de cette cavalcade. Louis-Stanislas Decormeille (1859-1940), fabricant de bois à galoche, rue de Paris, et Eugène Hublot (1875- ?), quincaillier et marchand de fer rue de la République, étaient respectivement président et trésorier du comité d’organisation. Les deux vice-présidents étaient le marchand de vins et spiritueux Eugène Cappronnier (1865-1927), établi rue d’Amiens et André-Fernand Delavoipière (1872- ?), cafetier, rue Raoul-Levavasseur. Quant au secrétariat, il était assuré par Ludovic Patoux, agent d’assurances rue de Paris, et Eugène Delaborde, restaurateur et hôtelier du Café de France, rue de la République.
Outre un certain nombre de manifestations musicales, comme le défilé de la fanfare de Bonneuil-les-Eaux ou l’aubade des trompes de chasse d’Amiens, la cavalcade se traduisait essentiellement par un défilé de chars et le pavoisement de la ville, le tout costumé avec la participation de centaines de figurants recrutés dans la population, et placé sous le signe du règne de Louis XIV.
Le programme se déroulait ainsi. En premier lieu, la reine de la cavalcade – en l’occurrence représentée par la jeune Britulienne Claire Autiquet – était solennellement reçue à 11 heures en l’hôtel de ville.
Puis, commençait à 12 heures le défilé de chars « historiques » dans les rues de la ville, avec plus de 200 figurants. Ces chars, abondamment illustrés par la photographie, étaient au nombre de 14, les deux premiers étant, royauté oblige, le char de Louis XIV et de sa cour, suivi du monumental char de la reine et de ses dames d’honneur précédé d’une troupe de mousquetaires à cheval. Les 12 autres chars étaient essentiellement dédiés à de grandes figures du commerce et de l’industrie de Breteuil qui avaient évidemment conçu et réalisé cette manifestation de leur prospérité.
On découvrait ainsi le « char de la marmite à Machu », sur lequel s’affairait une équipe de cuisiniers pour célébrer le renom du restaurateur et cafetier Alfred Machu (1873-1949).
On remarquait également le spectaculaire char de la Gauloise, bicyclette emblématique des établissements Gueudet Frères, mais char qui était couronné d’un aéroplane !
Le char de l’Industrie avait été conçu par la Société industrielle d’articles d’éclairage d’Esquennoy. Quelques éléments du cortège illustraient certaines activités économiques et commerciales : le char de la Banque, conçu par l’ébéniste Jules Dairin, arborait une monumentale pièce de monnaie ; quant à celui de Gambrinus, célébrant l’activité brassicole, il avait été réalisé par le brasseur Marcel Labiche. D’autres chars évoquaient enfin d’emblématiques monuments ou l’actualité du moment, comme celui du Moulin de la Galette ou encore celui du Pôle Nord, conçu par l’entrepreneur de bâtiments Fernand Candillon et Patoux, et qui célébrait les récentes expéditions et découvertes polaires.
Ce monumental défilé traversait tout Breteuil, dont certaines rues avaient fait l’objet d’un pavoisement « historique », telle cette muraille crénelée érigée à l’angle de la rue de la République et de la rue de Beauvais.
Après la cavalcade, venait, à 18 heures, le tirage d’une grande tombola suivi d’un « apéritif-concert », et enfin, à 21 heures, les festivités se terminaient par un bal gratuit « à grand orchestre », avec attractions foraines place du Jeu-de-Paume.
Outre le sujet même de la cavalcade et de ses chars empanachés, les nombreuses photographies de cette fête constituent une documentation iconographique exceptionnelle sur le Breteuil d’avant 1914, qui vient avantageusement compléter les cartes postales éditées à la même époque.